NOUVELLE RÉALITÉ

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Qu'est-ce que la réalité ?

898 Peinture de guérison

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Dans quelle mesure un phénomène (un événement) peut-il être qualifié de réel ? Dans cette question, on peut s’interroger sur le sens de « phénomène », de « qualifier » et de « réel ».

Définitions de ces trois mots :

Un phénomène est un objet des sens, quelque chose qui est perçu : qui est vu, entendu, senti (par l’odorat), goûté, senti (par le toucher) ou pensé (perçu par l’esprit). On peut différencier ici la perception sensorielle directe d’un phénomène de l’interprétation qu’en fait le mental, basée sur la mémoire.

La qualification est la capacité mentale de nommer un phénomène et de lui attribuer des qualités (l’agrégat* de la perception chez les bouddhistes).

Curieusement, qualifié signifie aussi « qui a les qualifications pour ». On peut donc se demander qui est qualifié pour qualifier, et si on peut répondre à cette question, on aura déjà une réponse à la question de départ.

Réel est subtil. Est-ce que le fait de percevoir un phénomène lui donne une réalité, et quelle sorte de réalité ? Et dans quelle mesure pouvons-nous faire confiance à nos sens pour savoir si ce que nous avons perçu est réel ?

Par exemple, dans le cas d’une personne que je vois en face moi : est-elle réelle ? Et si je vois son reflet dans un miroir, ou une photo d’elle, si je lis un article sur elle, qu’on me parle d’elle, si je pense à elle ou que je parle avec elle au téléphone ? De quelle réalité s’agit-il, de la perception directe de la personne elle-même ou d’une formation mentale relative à cette personne ?

Et même dans le cas de la perception directe, le fait de voir un être humain, une certaine per­sonne, n’est-il pas déjà une formation mentale, un concept basé sur une mémoire ? La personne existe-t-elle vraiment en tant qu’entité inhérente séparée de celui qui la perçoit ? Et celui-ci, est-il réel ou n’est-il aussi qu’une formation mentale, qu’un concept ?

La capacité de percevoir avec les sens, celle de nommer et de qualifier, celle de faire des com­mentaires et celle d’être conscient de tout ça, ne sont que des fonctionnements mentaux subjectifs (les agrégats du bouddhisme). Dans quelle mesure sont-ils habilités à donner une réalité à des phénomènes qui ne sont que les objets de ces fonctionnements ? Et une réalité par rapport à quels critères ? À quelle autorité ?

Une autorité qui prétend que les croyances qu’elle nous inculque sont la réalité ? Une autorité qui n’est qu’une autre perception illusoire ?

Il semble donc que la réalité ne soit qu’une construction mentale créée à partir de perceptions sensorielles : les perceptions des cinq sens (vue, ouïe, odorat, goût et toucher). Les perceptions du sixième sens, le mental, sont principalement de trois types : son interprétation des perceptions des cinq sens physiques ; des informations ou idées extérieures transmises surtout par la vue (lecture) et l’ouïe (parole) et les interprétations qu’il en fait ; des informations intérieures qui proviennent surtout de la mémoire de perceptions et d’informations anciennes qui sont réinterprétées en relation avec les perceptions présentes. 

Ces différentes perceptions sont solidifiées par le mental sous forme d’images, d’idées, de croyances, de concepts qui constituent ce qu’il considère comme la réalité, ou le monde. Il existe des réalités individuelles – résultats de perceptions individuelles (d’expériences individuelles) ; et des réalités collectives – résultats de perceptions collectives (par exemple un reportage télévisé que des millions de gens ont vu).

L’interprétation des perceptions individuelles ou collectives va varier un peu selon les personnes, en fonction des mémoires et des conditionnements de chacune, par exemple selon le pays, la cultu­re, l’âge, le milieu social, le type d’éducation, etc., créant ainsi de grandes catégories de gens qui ont une vision du monde similaire, qui leur donne l’impression que cette réalité existe vraiment puisque les autres la perçoivent aussi ; mais ils ont simplement vu le même événement et en ont fait une interprétation similaire. 

On voit donc comme il est facile avec les moyens de communications actuels de créer de toutes pièces une réalité fictive et de faire croire aux gens que c’est la réalité. C’est d’autant plus facile que la société a commencé à formater l’esprit des gens depuis leur plus jeune âge. Et c’est ainsi qu’un monde illusoire est considéré par la grande majorité des gens comme la réalité. Alors que ce ne sont que des formations mentales qui n’ont pas plus de réalité objective que toutes les autres pensées qui traversent notre esprit du matin au soir…

La suite de l’histoire est d’observer si la réalité que nous nous sommes créée nous apporte du bonheur ou de la souffrance.


* Agrégat (pali : khandha) : khandha signifie agrégat, tas, ensemble. Les cinq agrégats sont, selon les bouddhistes, les cinq grandes catégories – ou ensembles d’éléments – qui constituent l’être humain. Il s’agit de l’agrégat matériel : le corps (rupa), et des quatre agrégats mentaux : la sensation (vedana), la perception (sañña), les formations mentales (sankhara) et la conscience (viññana).

 

12-13 avril 2016, Chiang Mai

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